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Organisation de l'espace

L'ancien village des Salles-sur-Verdon était situé au c\oeur de la plaine du Verdon, à la frontière entre le département du Var et le département des Alpes-de-Haute-Provence. Cette région, qui fait un trait d'union entre la Haute et la Basse Provence, présente un relief très tourmenté et le village des Salles-sur-Verdon était implanté sur une des rares plaines de cette région. Le village bénéficiait d'un climat méditerranéen, avec des hivers froids et des étés chauds et secs, les précipitations étaient fortes en automne et au printemps ; de plus le village était souvent balayé par le Mistral, ce qui lui permettait de bénéficier d'un ensoleillement prolongé.

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Figure1. Vue aérienne de l'ancien village des Salles-sur-Verdon

Grâce à une situation géographique exceptionnelle, la commune des Salles-sur-Verdon s'est tout naturellement tournée vers l'agriculture. Ainsi, l'espace de la commune était organisé en fonction de cette activité, d'après A. Latz [1979, P. 26], il était caractérisé par trois modes d'appropriation différents :

Le village était traversé d'est en ouest par la rue principale, qui reliait Moustiers à Fontaine l'Evêque. Ce village présentait une architecture regroupée avec de petites rues étroites qui permettaient toutefois de laisser passer une charrette. Seules ces rues étroites étaient orientées nord/sud, les deux rues principales étant disposées de façon à ce que les maisons coupent le vent les jours de Mistral. En son centre, le village était composé de petites parcelles qui abritaient les maisons des journaliers, les commerces et les artisans ; autour du centre se trouvaient les parcelles plus importantes regroupant les maisons d'habitation et les dépendances ; à la périphérie du village on trouvait les porcheries, les bergeries et les granges, mais d'après M. G. à part dans la partie la plus ancienne du village (au sud-est), environ un bâtiment sur deux avait une vocation agricole (grange, étable...). Au centre du village, se trouvaient deux places, la place de l'église et la place du château autour de laquelle étaient regroupés les commerces, le café, le lavoir et la fontaine, cette seconde place était un lieu social privilégié.

En ce qui concerne les réseaux de communication, l'ancien village des Salles-sur-Verdon, situé au centre de la plaine du Verdon, était un lieu de passage privilégié. Dès le Moyen-Age, beaucoup de pèlerins passaient par les Salles pour se rendre à Moustiers où un prêtre baptisait les enfants mort-nés en les faisant ressusciter le temps du baptême. Mais c'est au début du XXesiècle que la vallée fut rendue célèbre avec E.A. Martel qui, chargé par le ministère de l'agriculture, devait explorer les gorges du Verdon et étudier les origines de la source de Fontaine l'évêque. Après la Première Guerre Mondiale, le passage s'est démocratisé avec la compagnie des guides fondée par Isidore Blanc. Mais sans parler du développement touristique qui ne s'est généralisé qu'à partir des années 50-60, le village des Salles-sur-Verdon était selon F. Simian, mieux desservi qu'aujourd'hui. Le réseau routier étant encore peu développé, il y avait une navette qui faisait le lien entre Draguignan et la vallée du Verdon : «Par tous les temps, Lovera passait tous les jours même pendant l'occupation avec son gazogène. C'était le chauffeur du véhicule reliant Moustiers à Draguignan par les Salles, Bauduen, Baudinard, Moissac, Aups, Tourtour et Lentier. Il partait à cinq heures de Moustiers, il y retournait le soir à vingt heures. Il apportait le courrier, les commissions et le ravitaillement pour les commerces.»[Simian, p.6]. En fait vu la faiblesse des moyens de communications il avait été décidé dès les années 1910 de relier le village par le téléphone, les PTT ont donc été équipés très tôt d'un téléphone, qui est ainsi arrivé aux Salles avant l'électricité, installée seulement dans les années 30.

Ainsi, jusque dans les années 30 on vivait comme au siècle précédent, dans les maisons on s'éclairait à la lampe à huile (le calèn) ou à la lampe à pétrole. L'eau courante n'étant pas installée, on allait chercher l'eau à la fontaine et les eaux usées étaient vidées sur les tas de buis à côté des maisons ou dans le Riou ou le canal d'arrosage. A l'époque, les mesures d'hygiène n'existaient pas et il s'est avéré que le village des Salles avait un taux de mortalité supérieur à la moyenne française. Pour lutter contre les maladies, des travaux de réfection des canalisations en eau potable ont été réalisés, et une nouvelle fontaine a été inaugurée en 1912. Lentement les conditions de vie s'améliorent et la municipalité vote au fur et à mesure des arrêtés pour limiter la propagation des germes (interdiction de laver dans la fontaine de la place, le lavoir doit être tenu propre, interdiction de jeter déchets et eaux usées par la fenêtre, interdiction de déposer du fumier à moins de 25 mètres d'une réserve d'eau potable, interdiction de dormir dans les granges...) [Bulletin de mémoire vive N^1, 2001 : p.10-15).

Les maisons, quant à elles, ne se sont pas beaucoup modernisées durant la première moitié du XXesiècle. Selon M. G., aux Salles-sur-Verdon après la deuxième guerre on n'a pas construit de maisons neuves et la plupart des maisons n'ont pas été restaurées ; ainsi les façades étaient rarement enduites et de l'extérieur les maisons ne paraissaient pas en bon état, même si quelques aménagements intérieurs avaient été faits. Chez les grands-parents de M.G. la maison avait trois étages mais rien n'était au même niveau, quand on montait d'un étage par l'escalier raide et étroit, il fallait redescendre quelques marches pour aller dans la pièce du premier niveau. L'eau et le tout-à-l'égout n'ayant été installés dans les habitations qu'au début des années 60, la salle de bains avait été construite au grenier, ce qui rajoutait un peu plus de mystère dans l'architecture de la maison. La pièce à vivre était au rez-de-chaussée, en fait c'était une immense cuisine, aux étages se trouvaient les chambres, et il y avait une cave en sous-sol. Le sol était fait de carreaux en terre cuite, mais aucun de ceux de l'escalier n'étaient identiques. En été, pour se protéger de la chaleur et des mouches un épais rideau était tendu sur la porte d'entrée et on gardait les volets fermés, mais ce sont surtout les murs épais qui permettaient de garder la fraîcheur. En fait, la plupart des maisons du village étaient comme celle-là, ni trop moderne ni trop arriérée. En ce qui concerne le degré de modernité à l'intérieur des maisons, la plupart étaient équipées d'électroménager de l'époque mais par contre il n'y avait pas de machine à laver le linge, car les femmes préféraient aller au lavoir près du canal et discuter avec les autres femmes du village ; ainsi le lavoir était un lieu de rencontre privilégié pour les Salloises. D'après la monographie de F. Simian, cinq à six fois par an c'était l'époque de la grande lessive, les femmes et les enfants s'occupaient de cette tâche. «De bon matin, on entassait les draps (quelquefois 50) dans de grands cuviers, sur les draps on plaçait une toile et sur la toile des cendres que l'on achetait chez le boulanger, car il fallait qu'elles soient propres. Sur celles-ci, on versait de l'eau chaude. Cette eau était récupérée au bas des cuviers dans des bassines, c'était le lessif. Avec des casseroles, les enfants la renversaient sur les cendres et ainsi de suite une grande partie de la journée.»[Simian, p.4]. Cette pratique a perduré jusqu'à la fin du vieux village, mais avec l'arrivée des machines à laver au nouveau village l'usage des lavoirs s'est perdu. Même si ceux-ci ont été conservés, ils ont désormais plus une valeur patrimoniale qu'une valeur d'usage.

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Figure2. Le lavoir de la place.

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Figure3. Le Valla, lavoir situé à la sortie du village, sur la route de Alambics


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