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Les enjeux de l'environnement : un nouveau territoire dans un nouveau paysage

La décision de construire un barrage a engendré de nombreuses modifications de l'espace et par conséquent une modification de son utilisation. Les habitants de la région ont hérité d'un nouveau territoire et d'un nouveau paysage qu'il leur revenait de protéger. On l'a vu en seconde partie l'ensemble de la vallée du Verdon a été très vite convoitée pour ses formidables potentialités touristiques, avec la création de plusieurs retenues d'eau il y avait un vide à remplir, et le tourisme devenait la solution idéale. Face à ce déchaînement de la part des promoteurs et autres aménageurs, l'Etat s'est rapidement manifesté pour protéger ce qu'il venait de modifier et qui ne pouvait être surexploité, à cause de l'utilisation qu'il y avait programmé. Ainsi l'Etat en créant la CIARV est venu poser des gardes fous et proposer des solutions de développement raisonnées. Les villages de la vallée ne se sont pas occupés tout de suite des questions d'environnement même s'ils ont été obligés d'appliquer quelques lois en ce domaine (loi littoral autour du lac, loi montagne...), mais l'ensemble des initiatives de l'Etat devaient seulement permettre de limiter les dégâts, les locaux ont donc dû se mobiliser pour prendre le relais.

Les associations de protection du patrimoine ont joué un grand rôle dans cette nouvelle prise en charge de l'environnement. Alors qu'auparavant les concepts de protection de l'environnement n'étaient pas connus, ou simplement n'étaient pas nécessaire puisque l'équilibre de la nature n'était pas menacé ; dès la création du lac, il a fallu faire face à de nouveaux problèmes. Les principaux et non des moindres, résultant des nuisances engendrées par un afflux incontrôlé de touristes. Dès le début des années 80, le lac de Sainte Croix avait acquis toute sa renommée, et les bords du lac furent rapidement envahis par de nombreux campeurs sauvages. Même si on ne peut pas dire qu'ils étaient irrespectueux de l'environnement, leur nombre et leur flux incontrôlé engendrait inévitablement des pollutions (voitures, ordures, feux de forêt...) et des réactions vives de la part des populations locales.

D'après l'association Alpes de Lumière, à partir des années 80 il y a eu une levée de boucliers et une prolifération des associations en faveur de l'environnement mais celles-ci ne sont pas toujours en accord entre elles, ce qui freine la réalisation d'actions concrètes et efficaces. La principale préoccupation à ce moment là, est de trouver une solution économique aux problèmes de la région, l'environnement n'est pas vraiment la priorité et les associations en faveur de la conservation du patrimoine ne font pas le poids face aux intérêts économiques. Selon Alpes de Lumière, même si l'on assiste à un commencement de convergence entre le pouvoir de l'Etat et la volonté locale, pour une remise en ordre du site et un programme de mesures de protection compatible avec le maintien de la vie dans les communes [Martel, 1982 : p.71], peu d'actions arrivent à terme. Il est donc indispensable que les habitants du site prennent les choses en mains. Car même si l'Etat impulse une politique en faveur de l'environnement, paradoxalement le site n'est pas classé. Cet Etat, qui instaure des lois de protection de l'environnement, se donne également la possibilité d'exploiter de nouveau ce site en ne permettant pas sa protection rigoureuse, l'Etat garde en réserve une partie de la région. Ainsi jusqu'en 1981, le site des Gorges du Verdon sera menacé par l'ombre de nouveaux projets hydrauliques (comme le projet de Chasteuil et le projet Barbin), et même après cette date, une partie de la région, la plus viable au niveau de l'aménagement reste une option pour l'Etat. Au niveau local, les collectivités et les associations s'organisent lentement. Mais petit à petit il y a une prise de conscience de la part des locaux de la nécessité protéger leur cadre de vie, il leur faut intervenir et prendre les choses en main. Mais pour les communes situées sur ces nouveaux sites, il y d'autres problèmes à gérer, l'environnement semble un des moins urgents. C'est donc lorsqu'ils ont réglé les problèmes d'ordre matériel et économique qu'ils s'occuperont des problèmes d'environnement, en attendant, les structures associatives s'occupent tant bien que mal de préserver les sites, en informant les visiteurs.

En 1997, est (enfin) créé le Parc Régional du Verdon. Cette création relance de façon plus officielle la question de la préservation du patrimoine naturel, mais les parcs régionaux n'ont pas autant de pouvoir que les parcs nationaux. Implantés sur des territoires habités, ils ont beaucoup moins de pouvoirs législatifs et ils doivent faire avec le facteur humain, ce qui entraîne de nombreuses difficultés au niveau des actions mises en place. Il ne s'agit pas d'interdire, il faut négocier, d'autant plus que leur création a pour objectif la préservation d'un patrimoine et le développement économique. La création du parc régional du Verdon arrive assez tard, et elle fait face à de nombreuses difficultés, l'année dernière le parc a même failli fermer à cause d'une mauvaise gestion. Mais on peut dire qu'aujourd'hui l'essentiel est passé, les locaux ont pris conscience de la nécessaire alliance «Protection-Promotion»pour reprendre les termes de P. Martel [1982 : p.89]. Aux Salles en tout cas, même si les problèmes du village ne sont pas tous réglés, il y a eu cette prise de conscience, comme en témoigne l'association La Maison des Lacs en collaboration avec la municipalité et d'autres associations, qui tente de mettre en place des actions de développement en accord avec l'environnement dont ils ont hérité. Mais il est difficile de concilier développement économique et protection de l'environnement, et d'après le maire «En ce qui concerne la préservation de l'environnement, c'est assez compliqué. Aux Salles on a notre mot à dire sur ces questions, mais il faut tenir compte des autres communes. Par exemple, aujourd'hui se pose le problème de l'implantation d'une nouvelle Ligne Haute Tension, alors nous on n'en veut pas, d'autant plus qu'elle est destiné à amener de l'électricité de la centrale nucléaire de la vallée du Rhône, jusqu'à Nice, chez nous elle ne fait que passer. Alors ceux qui sont concernés par l'implantation sont d'accord, parce qu'ils seront indemnisés mais nous on n'aura rien. Ce sont des questions épineuses qui sont difficiles à gérer ». D'après M.G. ce genre de problème se posera toujours, »Si du jour au lendemain on propose aux Sallois quelque chose qui leur rapporte mais qui pollue, moi je pense pas qu'ils se poseraient beaucoup de questions».

Aujourd'hui les questions d'environnement sont plus qu'importantes, mais malheureusement lorsqu'elles se heurtent aux questions d'ordre économique, elles perdent beaucoup de poids. Au cours de mon étude sur la commune des Salles, j'ai trouvé une tentative de gestion raisonné de ces deux problèmes, mais une seule commune ne peut décider du destin d'une région, il faut un nécessaire regroupement pour mener des politiques de protection de l'environnement efficaces.


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